Par lecoqgourmand
Célébrées le mardi 29 septembre dernier en l’église Saint-Etienne de Roanne, les obsèques du grand chef ont attiré un peu plus de 800 personnes qui ont dû suivre la cérémonie devants des écrans géants disposés sur le parvis.
Pierre Troisgros est décédé à 92 ans le 23 septembre en début d’après-midi, à son domicile du Coteau (près de Roanne) en début d’après-midi. C’est également au domicile familial que s’était éteinte son épouse Olympe le 17 mai 2008. Après son frère de cœur Paul Bocuse, après Joël Robuchon, disparus en 2018, c’est une des dernières légendes de la gastronomie française qui s’en va. La nouvelle a provoqué une très forte émotion qui a atteint son apogée le 29 septembre jour de l’enterrement.
Il faut dire que cette date marquera une page dans l’histoire de Roanne, tant le destin de Pierre Troisgros (et de son frère Jean disparu le 9 août 1983) était lié à cette ville qu’il a participé à rendre célèbre dans le monde entier. Emue, la foule a participé quasiment de gaité de cœur au ban bourguignon qui a retenti à la fin de la messe, lorsqu’encadré par une haie d’honneur de cinquante chefs en tenue blanche le cercueil de bois violet de Pierre Troisgros est sorti sous les applaudissements. Un moment fort, à l’image du cuisinier que chacun s’accorde à définir comme bienveillant, humain, accessible, tout en rondeur et d’une bonne humeur naturelle.
« C’était un monument, un monument de la cuisine française, de la gastronomie française (…) mais il laisse une trace qui ne s’effacera jamais, déclarait le chef Philippe Etchebest au micro de France Bleu Loire. Vous voyez autour de vous, tous ces chefs, des chefs qu’il a formés, parce que Pierre Troisgros était un formateur dans l’âme. Il a fait grandir énormément de chefs aujourd’hui. C’est toute la cuisine française qui est là aujourd’hui pour rendre hommage à ce grand monsieur ». Le chef bordelais fait partie d’une sacrée lignée de chefs – Guy Savoy, Bernard Loiseau…- qui ont appris l’amour du métier dans les cuisines de la maison Troisgros. Dans la population l’émotion était aussi bien palpable : certains marchands des halles se souvenant de sa dernière visite une semaine avant sa mort.
Né le 3 septembre 1928, Pierre Troisgros est, avec son frère Jean, un enfant de la balle puisque l’année de sa naissance ses parents Jean-Baptiste et Marie, ont vendu leur Café des Négociants à Chalon-sur-Saône pour s’offrir l’Hôtel des Platanes (qui deviendra l’hôtel Moderne) face à la gare de Roanne. C’est ici que lui et son frère vont gagner du galon, une étoile après l’autre jusqu’en 1968 année de la consécration puisque c’est celle des 3 étoiles qui n’ont depuis jamais quitté la famille. C’est l’âge d’or pour Pierre et Jean qui participent à faire (avec Bocuse, Chapel, Blanc) de la grande région lyonnaise l’épicentre de la haute gastronomie française. En cuisine ? On travaille les cuissons, on allège les sauces, les accompagnements, on soigne la sélection des produits, les présentations : bref on modernise la cuisine française. Dans une atmosphère inspirée familiale qui est l’autre marque de fabrique associée au patronyme. « Rares sont les établissements, dans le domaine de la cuisine, qui peuvent témoigner, à un certain niveau de notoriété, de quatre générations de présence. Chacune de celles-ci a cherché — et trouvé jusqu’à présent — sa manière d’être à la fois fidèle et innovante : coller à l’époque sans rien renier de ce qui a fait la spécificité de cette maison. » Ces quelques lignes écrites en préambule de l’histoire de la famille* sonnent justes. Depuis 2017 la maison Troisgros s’est installée en dehors de la ville, au Domaine d’Ouches. C’est Michel Troisgros qui a initié ce déménagement avec son épouse Marie-Pierre. Et c’est d’ores et déjà son fils, César Troisgros, qui officie en cuisine. Son frère Léo n’est pas loin : depuis le mois juin 2020, il a pris avec son épouse Lisa la direction de La Colline du Colombier un des établissements de la galaxie Troisgros.
Bruno Lecoq
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